10.9.14

« le visage d’une mère est pour l’enfant son premier livre d’images. ma mère avait un visage de bon pain et j’aimais, quand elle me soulevait de terre et me portait à la hauteur de ses yeux, tapoter de mes doigts boudinés de garçon de trois ans la mie de ses joues claires. un peu plus tard, quand je commençai à écrire, vers six ou sept ans, je m’amusai à dessiner de mes doigts quelques mots sur ses joues. elle fermait les yeux, me laissait faire puis, sans jamais se tromper, disait à voix haute le mot que je venais d’appuyer sur sa chair : eau, feu, terre, lune. ainsi, celle dont la patience m’instruisait sur l’éternel était-elle devenue ma première page blanche. » (p.23)

« tout amour touche en nous à l’enfance, c’est à elle qu’il s’adresse et c’est sur un tel fond de blancheur que s’imprima soudain le visage en or de Louise Amour : je crus qu’il y avait dans son sourire assez de chaleur pour faire fondre toutes les neiges et, avec elles, toutes les noires mélancolies des mères hirondelles. » (p.34)

Christian Bobin, Louise Amour, Paris, Gallimard, 2004.

2 commentaires:

  1. Christian Bobin, dans LA PLUS QUE VIVE et AUTOPORTRAIT AU RADIATEUR, il kick des culs de sa vie.

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  2. ah tellement, ah il est génial !

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